La Tunisie se retrouve dans l’obligation d’élaborer une politique alimentaire à moyen et longs termes, pour renforcer sa sécurité alimentaire, au vu de la progression de la crise alimentaire mondiale, due entre autres aux répercussions du COVID-19 et du conflit russo-ukranien, ainsi qu’aux effets des changements climatiques », c’est ce qui ressort d’un récent rapport que vient de publier par l’Institut Tunisien des Etudes Stratégiques (ITES).
Selon ce document intitulé «La Sécurité Alimentaire de la Tunisie à l’horizon 2035», le système alimentaire en Tunisie souffre de plusieurs difficultés, dont la dépendance accrue aux marchés extérieurs (fluctuants), la forte pression sur les ressources naturelles, le morcellement des parcelles et le vieillissement des exploitants, conjugués à la désaffection de la main-d’œuvre jeune et le faible accès aux nouvelles technologies agricoles, qui sont autant d’exemples de facteurs structurels fragilisant la sécurité alimentaire des Tunisiens.
Pour l’ITES, il apparait indispensable de concevoir une vision globale de la sécurité alimentaire de la Tunisie à l’horizon 2035, favorisant la mise en place d’un système alimentaire inclusif, durable et innovant ; résilient aux chocs et aux changements climatiques et à dépendance réduite envers l’extérieur.
L’étude se fixe, dans ce cadre, une série d’objectifs permettant de réaliser la souveraineté alimentaire du pays, à travers la mobilisation d’une panoplie d’actions adéquates. Le principal objectif consiste à « assurer une disponibilité alimentaire soutenable et moins dépendante des importations », ce qui impose la mise en place d’une structure institutionnelle transversale et supra-ministérielle chargée de la sécurité alimentaire.
Cette instance sera chargée de l’élaboration de la nouvelle politique alimentaire et nutritionnelle, sa mise œuvre basée sur une coordination horizontale et verticale effective avec les parties prenantes, son évaluation et son ajustement périodique, en adéquation avec la vision stratégique de l’Etat et les aléas circonstanciels.
Parallèlement, il est impératif “d’améliorer la production et la productivité agricoles, en améliorant la préparation et la conduite des campagnes agricoles, en adoptant des techniques agronomiques mieux adaptées aux changements climatiques, en renforçant la vulgarisation agricole, en exploitant au mieux les terres domaniales…”.
L’ITES recommande, en outre, de renforcer la recherche et l’innovation au profit de la sécurité alimentaire et de repositionner l’intervention de l’Etat en tant que médiateur et régulateur stratégique dans le système alimentaire. “L’Etat doit élaborer un plan de libéralisation progressif par produit agricole, notamment en ce qui concerne des produits agro-alimentaires non stratégiques à l’instar du thé, café, sucre…”.
“Il doit Intervenir pour réajuster les prix de certains produits de base en cas de crise, et renforcer le contrôle aux niveaux des maillons de stockage et de distribution des filières agroalimentaires”.
L’étude souligne l’impératif, en outre, de réduire la dépendance alimentaire vis-à-vis des marchés extérieurs. Pour ce faire, elle recommande de mieux anticiper les futurs chocs et se préparer aux évolutions des marchés internationaux, de réduire la facture d’importation grâce à une planification pluriannuelle et maîtrisée des achats sur le marché international, de créer une procédure simplifiée d’importation des produits de base, en allégeant les procédures actuelles du marché public…
Par ailleurs, il s’agit “d’améliorer les circuits de stockage et de distribution et les conditions logistiques, en dotant chaque région de marchés (de gros et municipaux) et d’abattoirs adaptés, en multipliant les points de vente directe du producteur au consommateur, et en mettant en place des plateformes digitales et en numérisant les circuits de stockage et de distribution pour renforcer la transparence des transactions commerciales, et faire face à la spéculation”.
L’ITES appelle, aussi, à l’amélioration des conditions d’accès au financement, d’assurance et d’encouragement à l’investissement dans l’agriculture et l’agro-alimentaire et à la réduction des pertes et la valorisation des déchets alimentaires.