Entre 10 et 20, c’est la moyenne des mendiants qui croisent notre route en une journée. Ce sont des femmes et des hommes dans la force de l’âge, des vieilles personnes, des enfants, et ces dernières années des subsahariens en grand nombre et des Syriens, ceux et celles qui ont quitté leur pays après avoir participé à sa dislocation par les mercenaires aux ordres des décideurs destructeurs du monde.

La mendicité, pour la plupart frontale est souvent customisée par différentes pratiques ou prétextes.

Vous vous arrêtez devant une pharmacie et voilà que l’on vous apostrophe, une ordonnance médicale en main, “s’il vous plaît, je n’ai pas de quoi acheter des médicaments” et comme par hasard, ce sont toujours des maladies chroniques et handicapantes !

Vous sortez d’un laboratoire médical et on vous hèle, quelquefois tenant un enfant dans les bras ou par la main : “mon fils n’a pas de quoi faire des analyses”. Vous vous arrêtez devant un distributeur de billets et l’on vient à votre rencontre : “je n’ai pas de quoi prendre un billet de bus, de métro ou de train pour rentrer chez moi”.

“La mendicité est devenue omniprésente en Tunisie, avec des pratiques et prétextes de plus en plus élaborés.”

Si vous sortez d’une grande surface, c’est : “ je n’ai pas de quoi acheter un pain”, le “mes enfants n’ont pas de cahiers” est l’attaque juste quand vous sortez d’une librairie.

On peut compter les accroches pour les approches par centaines, les lieux, les postures sont bien étudiées et il est de plus en plus certain qu’on ne peut pas évincer les “interpellations des mendiants”.

Ils sont omniprésents, ils sont partout, dans les rondpoints, dans les croisements, à coté des feux rouges ou des stops, sur le bas-côté des routes et vous pouvez échapper à la vigilance d’un agent de police qui procède à un contrôle de routine mais pas à messieurs dames les mendiants ! Ils feignent des infirmités, se font accompagner par des enfants ou des bébés qui souvent sont loués à la journée !

S’ils ne vous demandent pas directement de l’argent, ils feront tout pour vous faire acheter des paquets de mouchoirs et autres gadgets ou nettoieront de force votre pare-brise. Ils sont devenus comme la mort, on ne peut les fuir !

“La loi interdit la mendicité, mais elle est rarement appliquée, laissant les réseaux de malfaiteurs prospérer.”

Et tout ce beau monde (sic) s’adonnant à l’activité très juteuse appelée mendicité évolue en toute quiétude devant les agents de l’ordre comme si ses acteurs sont des opérateurs patentés auxquels manquerait juste un rappel à l’ordre des services des impôts pour s’acquitter des devoirs fiscaux…

Par la loi qu’on tient à appliquer dans le cadre du rétablissement de l’autorité de l’Etat, la mendicité est pourtant interdite. L’article 171 (Nouveau) du code pénal puni de 6 mois de prison : “ Celui qui simule des infirmités ou des plaies dans le but d’obtenir l’aumône… Celui qui emploie à la mendicité un enfant âgé de moins de dix-huit ans. La peine sera portée au double si cet emploi se fait sous forme de groupes organisés.”*.

Ridha Karouida, président de l’Association de défense des droits de l’Homme et de l’information a révélé au mois d’avril 2023 qu’environ 4 mille mendiants dont 600 enfants “opèrent” dans le Grand Tunis et que 60% parmi eux sont des femmes accompagnées d’enfants. Il a également affirmé que la mendicité est organisée en réseaux et que 15% seulement sont poussés par la pauvreté. M. Ridha a cité les nationaux et les internationaux alors ? Combien sont-ils ?

“Environ 4 000 mendiants opèrent dans le Grand Tunis, dont 60% sont des femmes accompagnées d’enfants.” – Ridha Karouida

Cet état de choses, n’inquiète-t-il pas outre mesure les autorités publiques ? Ne les interpelle-t-il pas quant au rôle basique de l’Etat qui consiste à imposer le respect de la loi et à sévir contre les associations de malfaiteurs conduisant les affaires dans la nouvelle activité prospère qu’est la mendicité ? N’engage-t-il pas leurs responsabilités dans la protection des enfants mineurs ? Ne les préoccupe-t-il pas quant à l’image de la Tunisie, berceau de la révolution de la dignité ? (Resic) !

Mais…Faut-il être bête ! L’Etat a la tête ailleurs ! Lui même planche sur la recherche de fonds pour renflouer ses caisses ! Bien sûr dans la dignité et dans le respect d’un leitmotiv : pas touche à la souveraineté !!!

Mais comme la dignité d’un Etat dépend aussi de celle de ses “sujets”, oups de ses “citoyens”, il va peut-être falloir que notre cher Etat ne se fasse pas spolier de l’un de ses rôles les plus importants : celui social, au profit des autres qu’il s’agisse des associations qui doivent continuer sur leurs actions caritatives mais dans des proportions acceptables ou des États frères et amis. (Re-re-sic).

“Garantir à chacun une vie digne est une mission essentielle de l’Etat. Lutter contre la mendicité en fait partie.”

Garantir à chacun une vie digne, n’est-ce pas là, une des missions essentielles de l’Etat ? Assurer un minimum vital à tous, réduire la pauvreté, renforcer les institutions et les mécanismes destinés à protéger les individus contre les risques sociaux, assister les personnes en difficultés n’est-ce pas là des attributions revenant à l’Etat ?

Prendre des mesures et sévir contre les mafias organisées de la mendicité, n’est ce pas là le rôle de l’Etat ?

Devons-nous à chaque fois rappeler à notre Etat ce qu’un Etat doit faire pour assurer un minimum de dignité à ses protégés et éviter que la “révolution” de la dignité n’engendre pas la prospérité de la mendicité ?

Amel Belhadj Ali