Plusieurs indices montrent que le projet du magnat émirati Aboukhater, “Tunis Sports City“, en stand bye depuis 2008, connaît, en cette période, de sérieuses difficultés pour redémarrer. Selon des informations non encore vérifiées, le projet serait soit de nouveau reporté soit carrément abandonné.
Pourtant, au mois de janvier dernier, la presse tunisienne ne cogitait que du redémarrage de ce projet de 5 milliards de dollars (chiffre de 2009).
Mieux, Afif Bejaoui, président exécutif de Tunis sport city Sport avait invité les médias pour assister, le 22 janvier 2024, à une conférence de presse au cours de laquelle il comptait annoncer officiellement la relance du projet. Seulement, les journalistes invités ont été informés, juste avant la tenue de la conférence que cette dernière a été annulée sans aucune explication.
Annulation du point de presse devant annoncer le redémarrage du projet
Il semble que certains problèmes d’une certaine gravité sont survenus avant la tenue de ce point de presse.
Ces mêmes problèmes auraient été évoqués par deux ministres tunisiens avec l’ambassadrice des Émirats arabes unis, Imen Ahmed Sellami. Les deux communiqués qui ont sanctionné les deux audiences accordées à la diplomate émiratie sont insipides et ne comportent aucun élément informatif.
“Le projet Tunis Sports City, en stand bye depuis 2008, connaîtrait de sérieuses difficultés pour redémarrer.”
Néanmoins, compte tenu du fait que ces audiences sont rapprochées dans le temps, on ne peut pas s’interdire de penser que le dossier de “Tunis Sports City”, a été au centre des discussions.
Un rappel succinct de ces audiences :
L’ambassadrice des Emirats Unis chez deux ministres
Le 19 janvier 2024, c’est-à-dire, comme par hasard, trois jours avant la tenue de la conférence de presse du président exécutif de Tunis sport city Sport, Afif Bejaoui, la ministre de l’Équipement et de l’Habitat, Sarra Zaâfrani Zenzeri, a reçu l’ambassadrice des Émirats à Tunis en présence de ses principaux collaborateurs.
Mention spéciale pour le nombre de ces derniers et de leur qualité. Il s’agit du directeur général des ponts et chaussées, du directeur général de la planification, de la coopération et de la formation des cadres, du PDG de la société des études et de la promotion de Tunis Sud, de la directrice générale des services aériens et maritimes, de la directrice de la coopération et de la planification, ainsi que le représentant du ministère des affaires étrangères, accompagnés d’autres cadres du ministère.
Au menu, il y a été certes question d’un autre mégaprojet touristico-immobilier, « La porte de la méditerranée » du groupe émirati Sama Dubai, mais on n’imagine mal que le dossier de Tunis Sport City, projet d’une cité sportive, composée d’une zone urbaine destinée à accueillir 30 à 50.000 habitants et à abriter des infrastructures sportives, ne soit pas abordé à cette occasion.
“L’investisseur émirati souhaiterait renégocier le plan d’aménagement de la zone ?”
Le 7 mars 2024, c’est-à-dire, une quinzaine de jours après l’annulation de la conférence de presse, le ministre des Domaines de l’État et des Affaires Foncières, Mohamed Rekik, reçoit l’ambassadrice des Émirats arabes unis, Imen Ahmed Sellami.
Là aussi le communiqué est incolore et inodore .« Lors de cette réunion, lit-on, les deux parties ont mis l’accent sur les moyens de renforcer les relations bilatérales privilégiées entre la Tunisie et les Émirats dans divers domaines, notamment en ce qui concerne le climat d’investissement en Tunisie et les incitations mises en place pour attirer les investisseurs ».
Face à cette absence criante de précisions, et partant de communication, on est en droit de deviner qu’il a été également au cours de cette audience du dossier du projet d’Aboukhater.
Le véritable problème de la brouille serait…
Abstraction faite de ce qui a été dit et de ce qui n’a pas été dit lors des deux audiences, il y a un autre élément qui est intervenu avant la tenue de la conférence de presse et qui serait à l’origine d’une certaine brouille entre le gouvernement tunisien et le groupe boukhater.
Cette décision, sous médiatisée pourtant, concerne la poursuite en justice de l’ancien ministre des Domaines de l’Etat, Hatem El Euchi pour soupçons de corruption dans le dossier du projet “Tunis Sports City”.
Le juge d’instruction auprès du pôle judiciaire économique et financier a décidé de déférer, le 11 janvier 2024, l’ancien ministre des Domaines de l’Etat, Hatem El Euchi, devant la chambre correctionnelle du pôle pour des soupçons de corruption dans le dossier précité. A l’origine, une plainte déposée, le 17 août 2022, par l’observatoire Raqabah auprès du procureur de la République près le tribunal de première instance de Tunis, et ce, pour des soupçons de conflit d’intérêt concernant ce dossier.
L’ancien ministre des Domaines de l’Etat qui a assuré, en sa qualité d’avocat, la défense de la société “Tunis Sports City” en Tunisie, dans son litige avec la société Al Buhaira de Développement et d’Investissement. Raqabah a estimé que cela constitue “un conflit d’intérêts flagrant, étant donné qu’en raison de ses responsabilités au sein du ministère, El Euchi aurait obtenu des données confidentielles concernant le dossier en relation avec le litige avec ladite société d’investissement”.
“Une conférence de presse annonçant la relance du projet a été annulée sans explication.”
Pour mémoire : le litige a été déclenché, entre les deux parties, suite à l’acharnement de l’investisseur émirati d’assortir la reprise des travaux à la renégociation du Plan d’aménagement de la zone considérée. Son projet était de transformer une partie du lot destiné à abriter la cité sportive en composante urbaine. Un scénario que la société « Al Bouhaira invest ex Société de promotion du lac de Tunis » a refusé. Et pour cause. Al Bouheira invest tenait justement à la composante sportive car elle constitue un complément à haute valeur ajoutée pour son offre urbaine globale sur les berges nord du lac de Tunis.
C’est, pour Bouheira invest, une des raisons majeures qui l’a amenée à vendre en 2007 et sur 3 tranches à l’investisseur émirati le terrain (252 hectares) à un prix préférentiel, à savoir 70 dinars le mètre carré -bien 70 dinars-. Pour comprendre la modicité du prix, il faut savoir que le mètre carré sur les berges du lac nord de Tunis est vendu, actuellement par la même SPLT, à plus de 3.500 dinars. Sans commentaire.
Fiche technique initiale du projet “Tunis Sports City”
Et pour ne rien oublier et surtout pour information, c’est en ces termes que le mégaprojet “Tunis Sports City”, a été présenté initialement au public. “Il s’agit d’une grande cité sportive, composée de neuf centres sportifs de formation. Le complexe s’étendra sur 255 hectares et sera découpé en trois zones.
Une première zone de 36 hectares sera consacrée à la formation de jeunes sportifs tunisiens et étrangers, alors qu’une deuxième zone de 100 hectares sera réservée exclusivement à l’aménagement d’un terrain de golf de 18 trous. Elle comptera également un complexe immobilier, une académie de golf et un Club House.
Dans la troisième zone, qui sera aménagée sur une superficie de 120 hectares, des unités hôtelières de luxe, des résidences, des centres commerciaux, des aires de jeux, des écoles privées et des cliniques privées, seront érigés. Ce complexe représente un investissement estimé à 5 milliards de dollars, et va créer 10 mille emplois (chiffres de 2009)”.