L’initiative d’un rapprochement entre la Tunisie, l’Algérie et la Libye suit son chemin. Elle pourrait prendre du champ et de la profondeur. Saura-t-on lui trouver le cap de la bonne espérance ?
Lundi 22, courant, la Tunisie a organisé sur son sol l’initiative d’une probable reconfiguration du Maghreb. C’est une architecture réduite conforme aux affinités du moment et pour cela elle semble mieux agglomérée.
On a le sentiment que l’affectio sociétatis est au rendez-vous. Ce préalable n’est pas à négliger il est à la base de tout partenariat durable. La preuve est que le président algérien Abdelmajid Tebboune disait, en substance, à son arrivée :’’La Tunisie est durement éprouvée mais elle fait preuve de résilience’’. Cela nous renvoie à la locution latine, devise de la ville de Paris ‘’Fluctuat Nec Mergitur’’ qui signifie ‘’battue par les flots mais ne sombre jamais’’.
“L’initiative d’un rapprochement entre la Tunisie, l’Algérie et la Libye suit son chemin. Elle pourrait prendre du champ et de la profondeur. Saura-t-on lui trouver le cap de la bonne espérance ?”
Cette adresse semble partagée par le président du Conseil présidentiel Libyen Mohamed El Menfi. Ceci pour dire que rarement invités n’ont fait preuve d’autant de bienveillance à l’adresse du pays hôte. Si un bloc économique devait prendre naissance à la suite de cette réunion consultative, il y a tout à parier qu’il s’agira d’une naissance désirée.
L’effet ‘’Momentum’’
L’idée d’un nouvel attelage maghrébin était dans les esprits depuis quelques temps, déjà. Et même que le Think tank de l’IACE l’avait formalisée avec un titre choc : ‘’ Atlas’’.
Cet acronyme signifie Algérie Tunisie Libye, une alliance stratégique. La chose à pris le temps de maturer. Voilà que l’étincelle a enfin jailli lors du sommeil des pays producteurs de gaz, tenue à Alger, au mois de mars dernier. La proposition est venue en son temps. L’effet momentum a joué, à plein.
Le constat est que les états pris séparément ne retrouvaient pas leur pleine fonctionnalité de puissance publique. Ils affrontent des assauts de terrorisme qui ne flanche pas, mettant à mal la stabilité des trois états, à des degrés différents. Ajouter à cela que les tensions économiques mondiales ne ralentissent pas.
“L’effet ‘’Momentum’’ : L’idée d’un nouvel attelage maghrébin était dans les esprits depuis quelques temps, déjà.”
Dans la note mémoire qui a présenté la rencontre de Tunis, on rappelait bien que les états pris seul ne trouvaient pas la riposte souhaitée. La Tunisie n’a toujours pas recouvré sa santé macro-financière. La Libye est en mal de préserver son intégrité physique. Et, l’Algérie quoi que bien nantie ne se redéployait pas comme elle le souhaitait.
Une concertation rapprochée dans un premier temps s’imposait. Et le communiqué final évoquait un probable regroupement à voilure extensible. C’est là une perspective raisonnable et réaliste. Concrétiser une complémentarité sur terrain est une proposition qui fait sens. Elle s’inscrit dans la marche du temps. Tout doit être fait pour prévenir tout éventuel effet de rejet. Une telle perspective servirait l’intérêt de chacun pour le bien de tous outre qu’elle n’est dirigée contre qui que ce soit.
À la recherche d’une masse critique
Si la Réunion consultative de Tunis débouchait sur un partenariat approfondi que serait le rôle de chaque pays ? La réponse laconique serait que chacun ferait de son mieux. Sans focaliser sur les détails focalisons nous sur l’allure d’ensemble. La question sécuritaire serait, de toute évidence, prise en mains avec une plus grande efficacité.
On ne peut se précipiter pour parler de l’éradication du terrorisme, mais une rémission significative serait garantie. Bien entendu une prise en mains des flux migratoires donnerait une plus grande tranquillité à la région dans ses rapports avec le partenaire européen.
À l’évidence les questions économiques et financières profiteraient d’un effet d’échelle. Et si, l’alliance future, l’Union ou quelque soit la forme que prendrait ce partenariat se confirmait l’attelage disposerait d’une masse critique, élément de poids face aux blocs existants.
“Si la Réunion consultative de Tunis débouchait sur un partenariat approfondi que serait le rôle de chaque pays ?”
Le communiqué commun évoque la constitution de commissions de planification, cela rassure. On a évité de tomber dans les envolées du passé. Se concerter sur les orientations futures est une touche méthodique qui prélude d’un crédit d’efficacité. Les urgences se bousculent et il est de bonne augure que l’on s’attache à prioriser les nécessités afin d’avoir des actions bien ciblées.
Conjurer les mauvais souvenirs du passé
Algérie, Tunisie, Libye, un ticket gagnant ? Quoi qu’il en soit il fallait tenter le coup !
L’initiative a eu de l’écho. Et voilà qu’elle est suivie d’effets. Quel avenir se dessine pour elle ? On a envie de dire que ses initiateurs sont avisés des échecs passés et feront tout pour les éviter. La tentative de rapprochement entre la Tunisie et la Libye en 1974 à mal tourné. Et déjà à sa naissance, elle a été désavouée par l’Algérie. Houari Boumediene n’a pas maché ses mot refusant de ‘’prendre le train en marche’’.
Sur un autre plan la BCMA, une banque mixte tuniso algérienne n’est jamais parvenue à allumer les feux d’une quelconque intégration économique entre les deux pays. Elle a fini par être liquidée.
Devant l’accumulation d’autant de déconvenues comment éviter tout scepticisme quant à l’aboutissement de l’initiative de Tunis. Les trois pays ont fait preuve d’une réserve de circonstance nous épargnant l’euphorie usuelle des effets d’annonce. C’est bon signe.
Par ailleurs le communiqué commun a bien cerné les défis du moment et ceux futurs. De même il laisse la porte ouverte à toutes les possibilités d’extension compatible. Une bonne touche méthodologique qui indique que la locomotive est bien sur les rails. Plein gaz dira-t-on et en avant, toutes !
Ali Abdessalem