Au commencement cette remarque : lors des manifestations économiques qui se tiennent à travers le pays, on a constaté que les statistiques fournies par les institutions nationales, Banque centrale, ministères, Institut national des statistiques, think tanks, bailleurs de fonds,  diffèrent d’une structure à une autre. Chaque institution a ses propres chiffres et ses propres critères pour les confectionner.

On a l’impression que ces institutions évoluent plus dans des bantoustans que dans un pays uni et bien organisé où les statistiques nationales sont produites sur la base de données conventionnelles suivies et acceptées par toutes les institutions productrices d’information.

A titre indicatif, lors d’un récent dîner- débat organisé,  le 23 avril 2024,  par la Délégation de l’Union européenne en Tunisie sur le thème « Relancer les IDE dans le nouveau contexte mondial », les représentants de la Banque centrale de Tunisie (BCT) et des structures d’appui à l’investissement ont donné des chiffres contradictoires sur l’évolution des IDE en Tunisie.

Et pour cause, autant les statistiques fournies, à cette occasion,  par le gouverneur de la BCT Zouhair Nouri, étaient alarmistes, autant celles exposées par Namia Ayadi, présidente de l’Instance tunisienne de l’investissement (TIA) et Jalel Tebib, Directeur Général de FIPA-Tunisia étaient optimistes et positives.

A préciser au passage que la TIA publie mensuellement les données concernant les investissements déclarés en Tunisie dans tous les secteurs d’activité.

Cette publication constitue une compilation d’informations statistiques provenant de diverses structures d’investissement sectorielles telles que l’APII, l’APIA, l’ONTT, l’ONAT et la DGFIOP.

Son principal objectif est de fournir des informations sur les tendances des investissements à l’échelle nationale, en termes de déclarations.

Le problème serait dans le choix des périodes

A l’origine de cette contradiction, le choix des période retenues pour mesurer le recul ou l’augmentation des IDE en Tunisie.

Pour montrer la baisse des IDE, le gouverneur de la BCT a préféré faire un parallèle entre deux quinquennats :2006-2010 et 2009 et 2013. Il a évoqué, à ce sujet quatre indices prouvant la diminution des IDE en Tunisie.

Le premier concerne la moyenne annuelle des flux d’IDE qui ont profité à la Tunisie lors du quinquennat 2009-2013. Cette dernière a enregistré une baisse de 58% en comparaison avec celle du quinquennat 2006-2010. En valeur, elle est passée à 728 Millions de dollars contre 1731 auparavant.

Le deuxième a trait à la part des Ide dans le PIB. Elle est estimée actuellement à 1,5% contre 4,1% auparavant.

Le troisième est un peu singulier. Il porte sur la part totale des flux des Ide  dans le quota de financement extérieur à long terme au cours du quinquennat 2019-2023. Cette part  ne représente que 17% contre 46,3% durant le quinquennat 2006-2010. Cette situation inquiétante a nécessité, d’après le gouverneur de la BCT,  un besoin accru d’endettement  extérieur au cours de cette période.

De son côté, Namia Ayadi, présidente de l’Instance tunisienne de l’investissement (TIA) s’est inscrite en faux, contre le constat selon lequel les IDE seraient en baisse en Tunisie.

D’après elle, durant le premier trimestre 2024 les déclarations d’investissement ont augmenté de 15%. Sur l’ensemble de de ces déclarations, 85% sont des créations, c’est-à-dire de nouveaux projets. Cela pour dire qu’on assiste, depuis 2024, à un changement de paradigme car durant les dernières années, les IDE enregistrés, sont majoritairement, des extensions.

Le site Tunisie attire toujours les IDE

Lui succédant, le directeur général de FIPA-Tunisia a indiqué qu’en 2022, la Tunisie a attiré 2.221 MDT soit une augmentation de 21,6% par rapport  à 2021. En 2023, la Tunisie a attiré 2.580 MDT , soit une augmentation de 13,5%. En 2024, la FIPA projette d’enregistrer 2.800 MDT

Morale de l’histoire : pour les deux représentants des structures d’appui à l’IDE,  il y a un sentiment de confiance qui se réinstalle. En d’autres termes, la Tunisie demeure compétitive et continue d’attirer des IDE.

Par delà, ces statistiques contradictoires qui peuvent, d’après leurs producteurs, se justifier selon l’angle qu’on prend, nous aurons toutefois préféré disposer de données unifiées sur un sujet aussi délicat. Car l’ultime but c’est d’adresser à l’éventuel investisseur étranger un message clair et précis et non un message de nature ambiguë.