Depuis quelques semaines, le gouvernement tunisien donne l’impression qu’il ne jure que par l’hydrogène vert. Pour satisfaire, semble-t-il, une forte demande d’investisseurs étrangers, les responsables en charge du secteur de l’énergie s’emploient à améliorer la visibilité des conditions de production de cette énergie verte dans le pays.

Il n’est pas besoin de rappeler ici que cette énergie propre est de plus en plus utilisée pour alimenter le secteur des transports (toutes sortes de véhicules confondues), pallier l’intermittence des énergies renouvelables au moyen du stockage d’électricité, et décarboner le secteur industriel.

Au rayon des démarches entreprises, en l’espace d’un mois, le gouvernement tunisien  a publié, le 4 mai 2024, la stratégie nationale en matière d’hydrogène vert.

Cette Feuille de Route (FdR), concoctée en partenariat avec l’Agence allemande de coopération internationale (GIZ), projette de produire, à l’horizon 2050,  8,3 millions de tonnes d’hydrogène vert et à créer environ 430 mille emplois verts. L’investissement total  prévu

Une stratégie nationale pour améliorer la visibilité du secteur

Concrètement, la stratégie arrêtée vise,  essentiellement,  à exporter environ 6 Millions de tonnes de H2 par an d’ici 2050 vers l’UE par pipeline et alimenter le marché local par environ 2 Millions de tonnes, sous forme d’H2V ou dérivés, tels que l’ammoniac, le méthanol CH3OH et les carburants synthétiques tous composés riches en atomes hydrogène.

Côté financement, la Fdr mise sur le soutien financier et organisationnel international et sur la signature d’accords-cadres à long terme avec des off-takers/producteurs et partenaires/développeurs.

A peine visible la filière a commencé à attirer des investisseurs étrangers. Pour preuve, deux protocoles d’accord, non contraignants encore juridiquement ont été conclus avec des groupes étrangers pour la production d’hydrogène vert en Tunisie.

Accord avec une consortium européen

Le premier a été signé, le 28 mai 2024, à Tunis entre le gouvernement tunisien et un consortium européen pour développer un mégaprojet d’hydrogène vert en Tunisie.

Par le canal de leur joint venture TE H2, les groupes français Total Energies et luxembourgeois Eren, associés à l’Autrichien Verbund, vont développer un méga-projet de production à grande échelle d’hydrogène vert à partir d’électricité solaire et éolienne dans le sud tunisien.

Ce protocole d’accord doit permettre d’ étudier la mise en œuvre d’un projet de production d’hydrogène vert, baptisé « H2 Notos », dans le sud de la Tunisie pour exportation à grande échelle vers l’Europe centrale par pipeline.

L’investissement nécessaire pour la première phase est estimé à environ 6 milliards d’euros (19,8 milliards de dinars), tandis que la phase finale, prévue pour 2050, représentera un investissement total de 40 milliards d’euros (132 milliards de dinars).

Accord avec le groupe saoudien ACWA Power

Le deuxième protocole d’accord a été signé, à Tunis, le 31 mai 2024, entre la société saoudienne ACWA Power, spécialisée dans le dessalement d’eau et le développement de projet d’énergies renouvelables. Objectif : explorer le potentiel d’un projet qui produirait jusqu’à 600 000 tonnes par an d’hydrogène vert en trois phases, en vue de l’exporter vers l’Europe.

La société développera, exploitera et entretiendra des unités de production d’électricité à partir d’énergies renouvelables d’une capacité de 12 GW, y compris des systèmes de stockage et des lignes de transmission, ainsi que des usines de dessalement d’eau de mer, des électrolyseurs et des infrastructures pour se connecter au gazoduc principal.

La première phase pour laquelle un investissement de 6,2 Milliards d’euros sera mobilisé consistera à installer 4 GW d’unités de production d’énergie renouvelable, 2 GW de capacité d’électrolyse, ainsi que des installations de stockage par batteries, afin de produire 200 000 tonnes par an d’hydrogène vert.

Les exportations de l’hydrogène produit devraient emprunter les voies du corridor South2, un projet de pipeline identifié comme un projet d’intérêt commun par l’Union européenne, reliant la Tunisie à l’Italie, à l’Autriche et à l’Allemagne.

Une réglementation incitative pour promouvoir le secteur

Et pour conférer à ces initiatives la légalité requise, le gouvernement vient de soumettre au parlement (ARP) un projet de loi encourageant les investissements de l’hydrogène vert en Tunisie. Il s’agit, particulièrement, de la mise en place de centrales solaires et de stations de dessalement.

Parmi les incitations proposées par la nouvelle loi, figurent la diminution de 30% à 50% d’impôts, une remise de 30% sur l’ensemble des frais et services proposés par les ports tunisiens,  une exemption complète des droits de douane et de la TVA sur les équipements et matières premières importées. Le projet de loi précise, ici, qu’il s’agit des équipements utilisés pour la construction des usines.

Pour pouvoir bénéficier de ces incitations, les investisseurs intéressés devront assurer un transfert de technologie en faveur de la Tunisie, employer 25%  des étrangers pour les premières années , proposer un autofinancement à hauteur de 70% du montant en devises étrangères et 25% d’intégration locale pour les produits mais également mettre en place un plan RSE.

Et pour être complet sur le sujet, un mot sur l’hydrogène retenu, en cette période transition énergétique comme une  énergie verte et renouvelable, dite énergie bas carbone. C’est en quel que sorte « l’énergie d’après ».  Il y a deux types d’hydrogène.

Il y a l’hydrogène vert qui est produit à partir de l’eau, d’hydrocarbures ou d’énergies vertes. Cette énergie est utilisée alors avec une pile à combustible ou par combustion directe.

Il y a l’hydrogène gris ou l’hydrogène naturel qui est enfoui dans le sol. C’est en quelque sorte une ressource naturelle découverte par les russes en 2008.  Elle ne nécessite pas pour son captage des forages à des milliers de mètres de profondeur. Elle est captable  à des profondeurs qui sont de l’ordre de 10 m à 1600 m.