L’Adoption du projet de loi « Innovation Act » demeure une urgence pour valoriser les résultats de la loi Startup’Act, développer l’écosystème des startups et booster leur contribution à l’économie nationale, a indiqué le président de l’association « TunisianStartups », Oussema Messoud.

Pour rappel, le concept des startups a été initié par la loi Startup Act promulguée en 2018 et entrée en vigueur, en avril 2019, avec l’octroi du premier label, mais ce cadre n’a pas anticipé la phase suivante, explique le président de TunisianStartups, une ONG fondée en 2016 et qui se veut la voix de l’écosystème des startups en Tunisie.

Startup Act a réalisé son objectif en créant un premier pool de startups (environ 1000) basées sur l’innovation et la scalabilité (capacité à s’adapter et à croître de manière efficace en réponse à une augmentation de la demande des produits ou services), mais aujourd’hui on a l’impression que l’écosystème est « un laissé pour compte », d’où l’urgence de la mise à jour de la loi en question, a-t-il appuyé.

Et de rappeler que suite à ce constat, une task force regroupant les secteurs public et privé et composée des ministères de l’Economie et de la planification et des Technologie de la communication, de l’Agence de Promotion de l’Industrie et de l’Innovation, de TunisianStartups et plusieurs autres intervenants, a travaillé, en 2022 et 2023, sur la mise à jour et le développement de Startup Act.

Innovation Act, un cadre plus adapté aux startups et entreprises innovantes

Baptisé « Innovation Act », ce projet de loi, élaboré dans le cadre d’une approche participative, se veut un cadre un peu plus adapté aux startups et aux entreprises innovantes.

En effet, l’investissement dans les startups, un modèle basé sur la prise de risque avec un potentiel de retour sur investissement très important qui a fait ses preuves dans plusieurs pays, ne constitue pas une priorité pour les investisseurs locaux. De plus, le cadre juridique actuel (Startup’Act/réglementation des changes…) ne permet pas d’attirer les investisseurs étrangers, a fait savoir Messoud lui-même startupper.

Pour lui, l’absence de mécanismes de financement internationaux et la taille étroite du marché tunisien sont à l’origine de l’immigration de plusieurs startups tunisiennes qui cherchent à mobiliser des financements à l’international auprès des investisseurs étrangers afin de se développer.

Plusieurs pays ont copié la loi tunisienne et ont pu avancer, souligne Messoud, estimant toutefois qu’il est temps d’améliorer et de faire avancer les choses pour passer à un autre palier favorisant la valorisation des réalisations et le rattrapage du retard par rapport au monde vu qu’il n’est plus possible pour certaines startups de continuer à se développer et à opérer à partir de la Tunisie avec ce cadre réglementaire.

Une nouvelle vague de mesures

Le projet de loi prévoit dans ce sens une nouvelle série de mesures qui permettront d’assouplir les procédures afin de garantir plus d’impact et de miser sur l’innovation pour sortir de la crise puisqu’il (projet de loi) concerne non seulement les startups mais aussi les entreprises innovantes.

En effet, le nouveau projet propose entre autres d’introduire de nouvelles activités d’autant plus que plusieurs d’entre elles (activités) sont soit interdites par la loi (drones) ou trop réglementées (fintech), d’où l’impossibilité d’innover, selon Messoud.

Et d’ajouter que ceci sera rendu possible grâce à la création de Sandbox sectoriels, à l’instar de celui créé au niveau de la Banque Centrale de Tunisie (BCT) pour tester des solutions financières innovantes avant de les valider.

Le projet de loi prévoit, également, de nouveaux mécanismes de financement adaptés aux startups et répondant aux standards internationaux.

Pour ce qui est de l’attraction des talents d’envergure mondiale, le projet prévoit l’octroi de visa talents tout en facilitant les procédures (plateforme en ligne avec une réponse rapide), pour permettre aux startups tunisiennes de recruter des talents étrangers afin de bénéficier de leur expertise.

Il porte aussi sur des incitations en faveur des compétences tunisiennes (employés des startups et entreprises innovantes) pour favoriser la rétention des talents tunisiens.

A titre d’exemple, le projet de loi évoque le versement d’une partie des salaires en devises et la possibilité d’accéder à une participation au capital de la startup (stock-options) via un plan de prise de participation selon les objectifs ou dans les filiales étrangères de la société.

Digitalisation et simplification des procédures

Le projet de loi prévoit, par ailleurs, la création de formes juridiques spécifiques aux startups au lieu des formes juridiques actuelles à savoir la Société à responsabilité limitée (SARL), la Société Unipersonnelle à Responsabilité Limitée (SUARL) et la Société anonyme (SA) qui ne sont pas trop adaptées.

En effet, explique encore Messoud, la gouvernance des SARL et des SUARL n’est pas trop formalisée (actionnaires et gérant), tandis que la SA est trop rigide pour les startups. « On a proposé des formes plus simplifiées telles que les sociétés par actions simplifiées (SAS)», a fait savoir le président de l’association.

Le projet de loi propose aussi la création de fonds d’investissement spécialisés et plus adaptés aux startups et à l’innovation avec des conditions simplifiées. Il s’agit de fonds réglementés mais avec peu de procédures accessibles via une plateforme digitale.

Les fonds qui passent aujourd’hui par le CMF (Conseil du marché financier) et ne sont pas très adaptés aux startups, sont plutôt habitués à investir dans le secteur industriel et les grandes sociétés, précise Messoud.

Le responsable a, par ailleurs, rappelé qu’une partie du projet de loi a été réservée à la phase post label, lequel (label) est limité dans le temps.

La startup n’a plus de label « Startup Act » soit car elle a échoué dans la scalabilité, ou elle n’a pas respecté la loi ou bien la validité du label (huit ans) a expiré, ou bien lorsque la startup réussit et s’agrandit (plus de 100 employés et plus de 15 millions de dinars de chiffre d’affaires).

En cas de réussite et d’expiration du délai du label, elle n’est plus considérée comme une startup mais plutôt une entreprise innovante, a-t-il encore fait savoir.

Au cours de cette phase, plusieurs avantages sont retirés dont celui de la prise en charge des cotisations salariales et patronales par l’Agence Nationale pour l’Emploi et le Travail Indépendant (Aneti) ou la détention d’un compte en devises, rappelle Messoud, estimant, toutefois, que ces avantages qui ont permis à la startup de s’agrandir devront être retirés graduellement pour éviter sa déstabilisation, tout en permettant aux nouvelles startups labellisées d’en profiter.