La quarantaine de barrages que compte le pays perdent chaque jour,  par l’effet de l’évaporation, quelque 700 mille mètres cubes d’eau. C’est ce qu’a révélé, le 10 juillet 2024, devant le parlement le  ministre de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, Abdelmonem Belaat.

Au plan annuel, selon des statistiques du bureau de la planification et des équilibres hydrauliques au ministère de l’agriculture, sur un volume annuel global de précipitations estimé à 37 milliards de m3, 8,5 Milliards de m3 ne sont pas récupérés en raison de l’évaporation et du ruissellement.

Face à cette situation catastrophique générée, en grande partie,  par le réchauffement climatique, le gouvernement a décidé de réagir.

En Tunisie, 700 000 m3 d’eau s’évaporent chaque jour des barrages : un chiffre alarmant !

Parmi les solutions proposées, le ministre de l’agriculture a indiqué que son département « envisage de lancer une expérience visant à réduire l’évaporation de l’eau dans l’un des petits lacs du pays ».

Il a ajouté que « son département œuvre à limiter les pertes par évaporation des eaux au niveau des barrages en étudiant les différentes solutions techniques possibles ».

Les différentes techniques de réduction de l’évaporation

Dans le monde, plusieurs techniques sont pratiquée pour réduire l’évaporation des eaux des barrages. Quatre d’entre elles méritent qu’on s’y attarde.

La première consiste à « utiliser des substances chimiques à longue chaîne, capable de former une pellicule à l’interface air/eau. Appelée« film mono-moléculaire », les  résultats obtenus ont permis d’enregistrer, à travers le monde,  des taux de réduction de l’évaporation significatifs. Ces taux varient en fonction de la substance utilisée, la durée entre deux applications de la substance et des conditions météorologiques de la région d’étude.

L’évaporation met en péril les réserves d’eau en Tunisie : des solutions urgentes sont nécessaires.

La deuxième technique porte sur le dévasement des barrages dont l’envasement excessif favorise l’évaporation des eaux retenues. D’après, l’Observatoire national de l’agriculture (ONAGRI), le taux d’envasement des barrages, a atteint, au mois d’août 2021, 23 % pour les 36 grands barrages du pays. « Ce taux dépasse 50 % pour les barrages de Mellègue, Siliana et Rmil, pourtant, un seul de ces trois barrages a atteint une durée de vie de 50 ans (Mellegue), les deux autres ont respectivement des durées de vie de 34 ans et de 19 ans, seulement, précise l’ONAGRI.

« Si rien n’est fait pour réduire la sédimentation, ces barrages qui sont situés généralement, dans des régions pauvres en ressources en eaux seront totalement envasés, en 2035, pour les barrages Mellègue et R’mili et en 2047 pour celui de Siliana », alerte l’observatoire.

L’Algérie, qui connaît les mêmes problèmes avec ses 80 barrages, a développé une expertise intéressante en matière de dévasement. La Tunisie a intérêt à s’en inspirer.

Des plateformes solaires flottantes pour protéger les eaux des barrages

La troisième est une technique française. Il s’agit de couvrir la surface des barrages de plateformes flottantes de panneaux solaires recyclables “fabriqués en polyéthylène à haute densité résistant aux rayons ultraviolets et à la corrosion ».

L’avantage est double. Il s’agit de réduire l’évaporation de l’eau et de disposer d’importantes ressources préservées d’une part et d’alimenter les agglomérations jouxtant les barrages en électricité produite à partir de l’énergie solaire, d’autre part.

Tunis a connu un avant-goût de ces plateformes flottantes. Le groupe français Qair, fournisseur d’énergie renouvelable indépendant, s’est distingué,  en 2022 en mettant en service la première centrale solaire flottante de Tunisie sur le lac de Tunis.

L’avenir de l’eau en Tunisie passe par la lutte contre l’évaporation dans les barrages.

La quatrième porte sur la construction de barrages sou terrain. Ce système consiste à retenir des eaux souterraines par un para fouille (corps du barrage) mis en place en travers des chenaux des eaux souterrains. Ce système demanderait une quantité énorme de travaux de construction.

Ce genre d’ouvrage, le ministère de l’Agriculture, des Ressources hydriques et de la Pêche projette d’en construire à partir de 2035.

C’est du moins ce qu’a annoncé, le 23 octobre 2023, sur les ondes de la radio privée, Mosaïque fm, Rafik Ainsi, directeur de cabinet du ministre de l’Agriculture, des Ressources hydriques et de la Pêche.

Au final, par delà ces éclairages sur les techniques dédiées à réduire l’évaporation,  nous constatons, que ce ne sont pas les techniques qui manquent pour préserver les eaux des barrages mais c’est leur coût onéreux qui poserait problème.