Outre les importations régulières du gaz naturel algérien, la Tunisie importe du pays voisin, quotidiennement entre 500 et 700 mégawatt d’électricité, soit 14% de sa consommation totale pour prés de 900 MD par an depuis 2022 !!!

Dramatique !

Dramatique, lorsque nous savons que la Tunisie aurait pu dès 2018 lancer des appels d’offres pour la construction des deux centrales électriques Skhira1 et Skhira2, les cahiers de charges étaient fin prêts, mais que les virtuoses économiques de l’époque (sic) en l’occurrence Slim Ferieni, ministre de l’Industrie et des PME et Zied Laadhari, ministre du Développement et de la Coopération internationale, n’ont pas estimé que la sécurité énergétique de la Tunisie revêtait une quelconque importance!

Dramatique parce que rien qu’à imaginer qu’un beau jour, l’Algérie, où beaucoup pensent qu’ils tiennent aujourd’hui la Tunisie par le cou, fasse basculer le bouton principal du disjoncteur électrique sur off, une partie importante de la Tunisie sera totalement paralysée!

Dramatique parce que tous les gouvernements qui ont succédé à celui de Chahed, n’ont pas cru bon de prendre de véritables décisions visant à assurer un minimum d’indépendance énergétique à la Tunisie. Leurs seules préoccupations éminemment populistes, étaient de rassurer un peuple appauvri de plus en plus à la perpétuation de la politique de subvention et de compensation même, si à termes, il en paiera les frais !

Les projets des deux centrales ignorées par le gouvernement Chahed et les autres devaient produire 1000 mégawatt d’électricité évitant à la Tunisie une dépendance à l’Algérie qui, en période de pointe, favorise, et c’est normal, son marché intérieur.

La Banque islamique de Développement avait à l’époque donné son accord de principe pour un prêt destiné à financer la construction des deux centrales. Un investissement qui aurait pu être amorti en 10 ans assurant à la Tunisie un relatif compter sur soi s’agissant de son approvisionnement en électricité !

Nous dépendons de l’Algérie aussi en gaz naturel et loin des délires des uns et des autres sur de quelconques relations privilégiées entre les deux voisins, la “grande sœur”, elle, n’use d’aucun sentimentalisme s’agissant de ses intérêts et en l’occurrence, la Tunisie ne bénéficie pas d’avantages spéciaux.

Si ce n’est que la Société tunisienne d’électricité et de gaz (STEG) et la compagnie algérienne des hydrocarbures (Sonatrach) ont signé un accord pour le renouvellement du contrat d’achat et de vente de gaz naturel de 8 ans (jusqu’en 2027) et une réduction de 10% sur les prix en cours.

Une convention qui ne couvre pas une nouvelle demande de la Tunisie, si besoin et en période de pointe, et qui ne souffre aucun retard de paiement, arrivées les échéances de règlement ! Aujourd’hui que les prix du gaz naturel ont grimpé de prés de 30%, le poids financier est plus lourd que celui prévu lors de la signature de ladite convention.

Il n’est de pire aveugle que celui qui ne veut rien voir !

Alors que le pays s’endette de plus en plus pour garder la paix sociale laissant aux futurs dirigeants, ceux des futures décennies, le soin de réparer les pots cassés et d’engager les réformes nécessaires, les élus “génies” n’ont pas estimé important de légiférer pour activer la réalisation du plan solaire, de s’informer sur les opportunités que peut représenter le gaz de schiste que l’Algérie, d’ores et déjà, extrait et exploite.

Ils ne se sont pas penchés sur des cadres légaux incitatifs pour encourager la production de l’éolien, l’hydrogène vert ou encore l’extraction du gaz de schiste, en revanche, ils étaient super contents et tapaient des pieds trop heureux d’avoir opposé un niet définitif au renouvellement des contrats des champs pétroliers d’Ashtart et de “Rahmoura” qu’ils veulent nationaliser ! Waw ! “Quelle victoire sur cet occident vampire qui veut encore spolier nos richesses ! Gardons-les pour nous mêmes, même sous terre !

Dieu que de complexes devrait gérer la Tunisie pour s’en sortir et que de batailles à livrer contre les dogmes et l’abrutissement !

Comme si l’État tunisien a les moyens de faire de la prospection gazière ou pétrolière ! En exerçant leur souverainisme dogmatique sur les richesses minières du pays, ces élus ont-ils pensé à la souveraineté de la Tunisie dépendante.

Ont-ils pensé au taux d’endettement de la Tunisie envers l’Algérie ? Ont-ils, ne serait-ce qu’une fois anticipé la hausse vertigineuse des fonds que l’État devrait, consacrer dans les prochaines années à la subvention de l’énergie ?

Savent-ils seulement que les subventions aux hydrocarbures et à l’électricité ont atteint 5,3% du PIB en 2022 et 4,4% du PIB en 2023 et qu’au terme de 2024, elles seront encore plus importantes et pourraient dépasser les 6% du PIB en 2028 ?

Hypothéquer l’avenir de la Tunisie, celui des futures générations, mettre le pays sous mandat énergétique algérien serait, à voir leurs postures, plus acceptable, plus raisonnable!

Préférer un taux de dépendance énergétique de 56% plutôt que d’encourager les investissements dans la prospection pétrolière et gazière serait préférable, pour ceux censés, défendre les intérêts de leurs concitoyens, à autoriser l’exploitation des richesses de son sous-sol pour que le pays s’affranchisse de la dépendance aux autres !

Insensé !!!

Il n’est de pire aveugle que celui qui ne veut rien voir !

Comment croire que la Tunisie républicaine progressiste de l’indépendance ait pu être la génitrice d’une telle classe politique, dépourvue d’un minimum de bon sens économique, plus intéressée par les grands slogans “révolutionnistes” populistes à souhait que par les intérêts supérieurs de la nation et ceux de la mère patrie.

Écœurant !

De quelle souveraineté pouvons-nous, nous prévaloir lorsque nous n’avons pas de sécurité énergétique ? Comment être sûrs que l’on ne nous soumette pas à des pressions nous obligeant à prendre des positions dans des conflits régionaux ou internationaux qui ne nous concernent nullement et qui nous enlèvent le statut de neutralité diplomatique dont nous nous sommes toujours prévalus ?

Elyes Kasri, diplomate, ancien ambassadeur a récemment exprimé son indignation dans un post FaceBook quant à l’état d’esprit qui règne dans certains milieux algériens : “Il est tout simplement humiliant et révoltant d’entendre des voix algériennes, heureusement minoritaires, parler de la Tunisie en tant qu’État failli qui dépend de l’Algérie pour se nourrir et que la solution serait pour l’Algérie d’absorber la Tunisie et d’en faire une wilaya algérienne. A nos frères et voisins algériens de réaliser que la fierté et l’orgueil nationaux ne sont pas l’apanage exclusif du peuple algérien et que le peuple tunisien, avec sa vieille et riche histoire marquée par des époques de repli et de renaissance, n’accepte pas ce genre de langage et cette hogra que certains se croient permis. L’histoire est pleine de rebondissements et nul n’est en droit d’insulter l’avenir et de se laisser tenter par la suffisance et la condescendance. Si les plus grands désastres historiques de Zama au Bardo nous sont venus de la frontière occidentale, nos frères et voisins algériens feraient bien de méditer les péripéties de l’histoire moderne et le contournement de la ligne électrifiée Morris, construite en vain par les colons français pour freiner les incursions armées du FLN à partir de la Tunisie…”

Le soutien de la Tunisie à l’Algérie lors de sa lutte contre l’occupant français relève de faits historiques que personne ne peut nier !

Les velléités et délires expansionnistes de certains algériens, ne valent rien, la Tunisie étant trop grande par son histoire pour être avalée par qui que ce soit, y compris par une Algérie grande par sa géographie !

La balle est dans le camp des dirigeants tunisiens qui doivent réfléchir de nouveau au sens profond de la souveraineté nationale qui ne consiste pas seulement à dire non au FMI mais aussi à dire non à ceux qui inondent nos frontières d’immigrés africains et qui n’ont jamais réellement aidé la Tunisie sauf peut-être en consentant quelques gestes destinés à la consommation d’une opinion publique émotive et réagissant de manière hormonale !

Amel Belhadj Ali