Tunis,20 sept. (TAP) – L’élection présidentielle du 6 octobre 2024 est la première à se tenir sous la Constitution de 2022 qui met les bases de la « troisième République » depuis la proclamation, après l’indépendance, de la République tunisienne.
Après l’indépendance, la Tunisie a, en effet, connu trois Constitutions ; celle de 1959 qui a fait l’objet de nombreux amendements jusqu’en 2008, la Constitution promulguée au lendemain de la révolution du 17 décembre2010/14 janvier 2011, et la Constitution du 25 juillet 2022, proclamée suite à un référendum et une série de mesures exceptionnelles prises par le président de la République Kais Saied à commencer par la dissolution du parlement.
Il convient de constater que dans les trois Lois fondamentales adoptées par le pays après l’indépendance, les prérogatives du président de la République variaient, ayant été, à plusieurs reprises revues, en fonction du régime politique adopté.
Dans la Constitution de 1959
Dans la Constitution de 1959, le président de la République, nomme le premier ministre et sur proposition de celui-ci, les autres membres du gouvernement. Il préside le conseil des ministres et met fin aux fonctions du Gouvernement ou de l’un de ses membres de sa propre initiative ou sur proposition du Premier ministre.
Le Président de la République veille à l’exécution des lois, exerce le pouvoir réglementaire général et peut en déléguer une partie au Premier ministre.
Le Président de la République nomme aux emplois supérieurs civils et militaires, sur proposition du Gouvernement.
Le Président de la République peut déléguer au Premier ministre le pouvoir de nomination à certains de ces emplois.
Le Président de la République conclut les traités.
Le Président de la République est le chef Suprême des Forces Armées. Il déclare la guerre et conclut la paix avec l’approbation de la Chambre des députés et dispose du droit de grâce. Il oriente la politique générale de l’Etat, en définit les options fondamentales et en informe la Chambre des députés.
Le Président de la République bénéficie d’une immunité juridictionnelle durant l’exercice de ses fonctions. Il bénéficie aussi de cette immunité juridictionnelle après la fin de l’exercice de ses fonctions en ce qui concerne les actes qu’il a accomplis à l’occasion de l’exercice de ses fonctions.
La constitution de 1959 a été appliquée de janvier 59 au janvier 2011, soit une période de 52 ans.
Dans la Constitution de 2014
La Constitution de la « deuxième République », a été adoptée après la Révolution tunisienne et l’élection d’une Assemblée constituante (ANC), chargée de son élaboration.
La Constitution de 2014 instaure un régime à trois têtes, à savoir la présidence du parlement et un pouvoir exécutif bicéphale qui se compose de la présidence du gouvernement et la présidence de la République.
Les prérogatives du président de la République sont réduites et différentes, dans le fond, de celles énoncées dans la Constitution de 59.
Le président de la République représente l’État. Il lui appartient de déterminer les politiques générales dans les domaines de la défense, des relations étrangères et de la sécurité nationale relative à la protection de l’État et du territoire national des menaces intérieures et extérieures, et ce, après consultation du Chef du Gouvernement.
Il assure le haut commandement des forces armées et peut déclarer la guerre et conclure la paix après approbation de l’Assemblée des représentants du peuple à la majorité des trois cinquième de ses membres et envoyer des troupes à l’étranger après l’accord du Président de l’Assemblée des représentants du peuple et du Chef du Gouvernement. Dans ce cas de mesure, l’Assemblée doit se réunir pour en délibérer dans un délai ne dépassant pas les soixante jours à partir de la date de la décision d’envoi des troupes.
Le président de la République préside le conseil de sécurité nationale auquel doivent être convoqués le Chef du Gouvernement et le Président de l’Assemblée des représentants du peuple. Il peut dissoudre l’Assemblée des représentants du peuple dans les cas prévus par la Constitution et prendre les mesures qu’impose l’état d’exception et les proclamer conformément à l’article 80.
Il ratifie les traités et ordonne leur publication, décerne les décorations et accorde la grâce.
Le Président de la République procède, par voie de décrets présidentiels à la nomination du Mufti de la République tunisienne et met fin à ses fonctions.
Il nomme aux emplois supérieurs à la Présidence de la République et aux établissements qui en relèvent ainsi qu’aux emplois supérieurs militaires, diplomatiques et de la sûreté nationale et peut y mettre fin après consultation du Chef du Gouvernement.
Le Président de la République promulgue les lois et ordonne leur publication au Journal officiel de la République tunisienne.
Le Président de la République bénéficie de l’immunité durant son mandat; tous les délais de prescription et de déchéance sont suspendus à son encontre. Les actions peuvent reprendre leur cours après la fin de son mandat.
Le Président de la République ne peut être poursuivi pour les actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions.
Les membres de l’Assemblée des représentants du peuple peuvent, à la majorité, présenter une motion motivée pour mettre fin au mandat du Président de la République en raison d’une violation grave de la Constitution. La motion doit être approuvée par les deux-tiers des membres de l’Assemblée.
Dans ce cas, l’affaire est renvoyée devant la Cour constitutionnelle qui statue à la majorité des deux-tiers de ses membres. En cas de condamnation, la Cour constitutionnelle ne peut prononcer que la destitution, sans préjudice, le cas échéant, des poursuites pénales. La décision de destitution prive le Président de la République du droit de se porter candidat à toute autre élection.
Dans la Constitution de 2022
La Constitution de 2020 rétablit le régime présidentiel. De larges prérogatives sont accordées au président de la République.
Le Président de la République est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, du respect de la Constitution et de la loi ainsi que de l’exécution des traités. Il veille au fonctionnement régulier des pouvoirs publics et assure la continuité de l’Etat et préside le Conseil de sécurité nationale.
Le Président de la République est le chef suprême des forces armées.
En cas de péril imminent (…), le Président de la République peut prendre les mesures exceptionnelles nécessitées par les circonstances, après consultation du Chef du Gouvernement, du Président de l’Assemblée des représentants du peuple et du Président du Conseil national des régions et des districts.
Le président de la République peut soumettre au référendum tout projet de loi relatif à l’organisation des pouvoirs publics ou à la ratification d’un traité susceptible d’avoir une incidence sur le fonctionnement des institutions, sans que ces projets ne soient contraires à la Constitution.
Le Président de la République nomme le Chef du Gouvernement et, sur proposition de celui-ci, les autres membres du Gouvernement.
Il met fin aux fonctions du Gouvernement ou de l’un de ses membres de sa propre initiative ou sur proposition du Chef du Gouvernement.
Le président de la République promulgue les lois constitutionnelles, organiques et ordinaires et en assure la publication au Journal officiel de la République tunisienne
Il veille à l’exécution des lois, exerce le pouvoir réglementaire général et peut en déléguer tout ou partie au Chef du Gouvernement.
Le Président de la République nomme aux emplois supérieurs civils et militaires, sur proposition du Chef du Gouvernement.
Dans la Constitution de 2022, le Président de la République bénéficie de l’immunité durant son mandat présidentiel, tous les délais de prescription et de forclusion sont suspendus à son égard. Les procédures peuvent reprendre leurs cours après la cessation de ses fonctions.
Il n’est pas responsable des actes accomplis dans le cadre de l’exercice de ses fonctions.