Le colloque international organisé à la mémoire de l’historienne Mounira Chapoutot Remadi, disparue en 2023, a pris fin, samedi matin, au siège de la Bibliothèque Nationale de Tunisie (BNT) à Tunis.
Intitulé « Avant-gardisme et pluridisciplinarité », ce colloque de trois jours se déroulé les 24 et 25 octobre au palais de l’Académie Tunisienne des Sciences, des Lettres et des Arts, Beit al Hikma, à Carthage-Hannibal. L’évènement a eu lieu en présence de 35 chercheurs de diverses disciplines et en présence des collègues et anciens étudiants de Mounira Chapoutot Remadi.
Historienne, spécialiste du Moyen-âge, du monde arabe et musulman, Mounira Chapoutot-Remadi (27 avril 1942 Tunis- 22 octobre 2023 Paris) était Professeure émérite à la faculté des Lettres de Tunis et membre de l’Académie Beit Al-Hikma, où elle avait dirigé le Département des Sciences humaines et participé à l’organisation de colloques de haute facture, ainsi qu’à l’enrichissement des échanges intellectuels et académiques sur des questions majeures.
Le directeur général de la BNT, Khaled Kchir, a souligné la valeur scientifique de Mounira Chapoutot Remadi, en tant que première Professeure émérite d’histoire en Tunisie ayant formé des générations d’intellectuels et d’universitaires, diplômés de l’Université tunisienne.
S’exprimant dans une déclaration à l’agence TAP, il a souligné que ce colloque, organisé conjointement par la BNT et Beit al Hikma, s’intéresse aux domaines d’intérêt de la défunte et constitue un hommage au parcours de cette historienne, tout en rappelant son parcours à la tête du Département des sciences humaines et sociales à l’Académie Beit al Hikma.
Pour sa part, Faouzi Mahfoudh, membre de l’Académie Beit al Hikma et coordinateur scientifique du colloque a expliqué le choix du thème « Avant-gardisme et pluridisciplinarité » qui s’inscrit dans une tentative de mettre en avant l’approche adoptée par Mounira Chapoutot Remadi tout au long de sa carrière à l’Université tunisienne, en tant que chercheuse aussi bien que dans l’encadrement de ses étudiants avec près de 150 sujets (mastère et doctorat).
Il a notamment évoqué l’orientation de la défunte qui était habitée par l’ouverture sur de nouvelles questions et sur la pluridisciplinarité, tant sur le plan géographique que cognitif.
Cette tendance était bien présente dans les travaux de recherche réalisés sous sa direction et qui couvrent l’histoire de l’Orient, du Maroc et de l’Afrique ainsi que celle de la médecine, des mathématiques, de l’astronomie, de l’architecture, de l’anthropologie et bien d’autres domaines du savoir, a ajouté l’académicien.
Comme d’habitude, les travaux des colloques de l’Académie sont publiés dans un livre. Un ouvrage collectif sera réalisé en collaboration entre l’Académie Tunisienne des Sciences, des Lettres et des Arts, Beit al Hikma, et la Bibliothèque Nationale de Tunisie.
Les thèmes de l’avant-gardisme et de la pluridisciplinarité s’inscrivent dans l’esprit qui a caractérisé Mounira Chapoutot-Remadi : l’érudition, la transdisciplinarité et la transmission des savoirs. Des universitaires et experts de renom ainsi que membres de l’Académie ont traité de l’histoire et de la société à travers ses multiples dimensions : anthropologique, humaine, socio-politique et scientifique.
Ayant joué un rôle précurseur dans son domaine, l’histoire, en Tunisie et en Orient, l’historienne s’est positionnée dans la pluridisciplinarité quant au choix de certains sujets de thèses de ses étudiants, pour adopter une posture transdisciplinaire à la fin de sa carrière en intégrant le groupe « Food Studies » qu’elle contribué à fonder à Beit al Hikma.
Le long de sa carrière académique, elle a brillé par ses approches pluridisciplinaires, aussi bien dans ses recherches que dans son enseignement. Elle a introduit les méthodes de l’anthropologie, de la géographie physique, de la démographie, de la psychologie et la médecine (à travers l’épidémiologie, la pharmacopée et la thérapeutique). C’est ainsi qu’elle a eu à encadrer des thèses et des mémoires sur l’histoire de la médecine et l’histoire des mathématiques.
Mounira Chapoutot Remadi fut l’une des premières à s’intéresser à l’anthropologie historique et au patrimoine matériel et immatériel. Appréhendant l’histoire non pas uniquement à travers les faits politiques mais dans toutes ses dimensions humaines y compris technologiques et scientifiques elle est considérée une historienne accomplie.
Interpellée par ce qui est nouveau, elle était d’une curiosité intellectuelle insatiable, transgressant les frontières entre les cultures et les disciplines et ouvrant des champs de recherche originaux et innovants. Avant-gardiste dans le choix des sujets qu’elle avait traités dans ses cours et ses recherches ou qu’elle avait proposés à ses élèves dans le cadre des mastères ou des doctorats, elle avait un esprit très ouvert sur les autres disciplines telles que la médecine, les mathématiques, les sciences fondamentales, les lettres et les arts.
Elle était aussi très passionnée par les romans et faisait partie des jurys de prix littéraires de grande renommés. Elle a toujours encouragé l’échange, l’interaction et la coopération au-delà des frontières disciplinaires.