L’écrivaine tunisienne Amira Ghenim a remporté le Prix de la littérature arabe 2024, porté par la Fondation Jean-Luc Lagardère et l’Institut du monde arabe (IMA) pour son roman “Le désastre de la maison des notables”, traduit de l’arabe par Souad Labbize.

Ce prix est l’une des rares récompenses françaises distinguant la création littéraire issue du monde arabe d’auteurs et autrices s’exprimant en arabe ou en français. La lauréate est autrice d’essais universitaires et de trois romans en arabe dont Le dossier jaune (2019), Le désastre de la maison des notables (2020) et Terre ardente (2024).

Le nom de la lauréate de cette 11ème édition du prix a été dévoilé à l’occasion d’une cérémonie organisée ce lundi 28 octobre, au siège de l’IMA à Paris. “Les carnets d’El-Razi” du tunisien Aymen Daboussi, psychologue-clinicien-auteur était également parmi les 7 romans dans la sélection officielle représentant la Tunisie, l’Algérie, la Libye, la Palestine et le Liban.

Dans un post publié, lundi soir, sur son compte facebook, Amira Ghenim a exprimé sa joie de remporter ce prix qualifiant “une victoire pour la littérature tunisienne dans sa richesse et sa diversité qu’elle partage avec tous les écrivains tunisiens”.

“Le désastre de la maison des notables” est le titre de la traduction française du roman en arabe “Nazelat Dar El Akaber” paru en 2020 aux éditions Meskilani (Tunisie) et Masaa (Canada). Il s’agit du premier roman de l’autrice à être traduit en français.

Ce roman a été traduit en italien par Barbara Teresi sous le titre “La casa dei notabili” (2022, Edizioni e/o). La version anglaise (Calamity of the Nobility) sortira en janvier 2025.

La copie française, composée de 494 pages, est une traduction de Souad Labbize parue en août 2024 aux éditions Philipe Rey (France) en coédition avec “Barzakh” – Collection Khamsa (Algérie). Souad Labbize est une poétesse, romancière, anthologiste d’expression française et traductrice littéraire algéro-tuniso-française.

Le jury présidée par Pierre Leroy (Administrateur délégué de la Fondation Jean-Luc Lagardère) était composé de Mahi Binebine (peintre et écrivain), Mustapha Bouhayati (Directeur de la Fondation Luma à Arles), Nicolas Carreau (écrivain et chroniqueur littéraire), Gilles Gauthier (ancien Ambassadeur de France au Yémen, traducteur des livres d’Alaa El Aswany), Houda Ibrahim (auteure et journaliste à Radio France Internationale-RFI), Alexandre Najjar (avocat, écrivain, Grand Prix de la Francophonie 2020) et Nathalie Sfeir (Responsable de rayon à la librairie-boutique de l’IMA).

Selon Pierre Leroy, administrateur délégué de la Fondation Jean-Luc Lagardère et président du jury, cette nouvelle édition consacre « un roman intense, entremêlant intrigue familiale et grande Histoire, qui dessine le portrait complexe et tout en nuances d’une Tunisie en pleine mutation. L’ensemble des membres du jury et moi-même saluons par ailleurs la plume unique de l’auteure qui, grâce à un procédé narratif élaboré, a su donner naissance à une œuvre puissante, portée par une nouvelle collection qui met en lumière la littérature arabophone du Maghreb, encore trop souvent privée d’écho en France », peut-on lire sur le site de l’IMA.

Pour sa part, Jack Lang, Président de l’IMA, a souligné « l’importance de faire rayonner la richesse des cultures du monde arabe, dont la littérature et la poésie sont des modes majeurs. Dans le contexte où la traduction des textes arabophones se raréfie, la mise en lumière des auteurs issus du monde arabe est essentielle et ce prix, également porté désormais par la jeunesse, en est le précieux instrument ».

Créé en 2013 par l’IMA et la Fondation Jean-Luc Lagardère, ce prix, doté de 10 000 € (près de 36 000 dinars), est l’une des rares récompenses françaises distinguant la création littéraire arabe. Elle promeut l’œuvre d’un écrivain ressortissant de la Ligue arabe et auteur d’un ouvrage écrit ou traduit en français. Valoriser et diffuser en France la littérature arabe en plein temps fort de la rentrée littéraire, telle est la volonté des fondateurs de ce prix, qui s’inscrit également dans le travail de fond mené par l’IMA, plus largement, sur ce sujet, avec notamment ses Rencontres littéraires.

“Le désastre de la maison des notables” est finaliste du Prix international du roman arabe, Booker et lauréat du Comar d’Or, en 2021. Il est également retenu dans la short list des romans en lice pour le prix Médecis étranger 2024, devenant ainsi le 2ème roman tunisien à figurer dans la sélection du Médecis, après “La clause Paternelle” (2017, Actes Sud) du tuniso-suédois Jonas Hassan Khmiri, lauréat du prix Médicis étranger 2021. Neuf romans étrangers et dix essais sont en lice pour le prix Médicis 2024 qui est une récompense littéraire française. Les lauréats seront couronnés à l’occasion d’une cérémonie prévue le 6 Novembre prochain dans un restaurant parisien.

Résumé : “Le désastre de la maison des notables” transpose plus de cinquante ans d’histoire tunisienne, de la lutte pour l’indépendance jusqu’à la révolution de 2011. Dans un pays en pleine ébullition politique, se croisent les destins de deux familles bourgeoises : les Naifer, rigides et conservateurs, et les Rassaa, libéraux et progressistes. Une nuit de décembre, à Tunis, Zbeida Rassaa, jeune épouse de Mohsen Naifer, est soupçonnée d’entretenir une liaison avec Tahar Haddad, intellectuel d’origine modeste connu pour son militantisme syndical et ses positions avant-gardistes, notamment en faveur des droits des femmes. Dans un entrelacement de secrets et de souvenirs, ce roman choral revient sur les répercussions désastreuses de cette funeste soirée. Comme dans un jeu de poupées russes, chaque récit en contient d’autres et renverse la perspective qu’a le lecteur de découvrir ce qui est réellement arrivé à Zbeida Rassaa.