Le projet de loi de finances (PLF) 2025 a prévu un important cadeau de fin d’année en faveur de la société Tunisienne de sidérurgie EL Fouledh et de la pérennité des emplois de ses agents et cadres. D’ailleurs, ces derniers, informés de la bonne nouvelle, ont décidé, semble-t-il, en réaction de reporter, pour la 6ème fois, leur grève pour le 21 novembre 2024.
Concrètement, cette entreprise publique, spécialisée dans la production de l’acier liquide et d’autres produits, va bénéficier, en vertu d’un article du PLF 2025, de la collecte gratis de la ferraille des entreprises.
Au regard de la grande quantité de ferraille entreposée, particulièrement, dans les entreprises publiques du pays (SNCFT, Transtu, CPG, ETAP, STIR, STEG, ONAS, sociétés de transport régionales, ports, aéroports …), El Fouledh va disposer, gratis, d’un grand gisement de matières premières.
Il s’agit d’un important avantage compétitif qui va permettre à El Fouledh, non seulement de satisfaire les revendications professionnelles de ses agents et cadres (du reste gérables) mais également d’accroître dans de bonnes conditions sa production et de retrouver sa place en tant que régulateur du marché.
Que dit l’article 36 du PLF 2025 ?
Pour revenir à l’article 36 du PLF 2025, l’exposé des motifs explique les raisons qui ont amené les pouvoirs publics à prendre cette décision.
On y lit notamment que “les équipements et engins usés qui ne servent plus et qui ont bénéficié d’un avantage fiscal à l’importation, sont exonérés des taxes et redevances exigées lors de leur démolition ou réexportation à la seule condition de les remettre gratis exclusivement à la société El Fouledh.
Cette disposition, qui sera soumise aux services des douanes concernés comme le stipule la loi, a été rendue nécessaire en raison de la tendance des entreprises propriétaires de ces métaux ferreux à renoncer, pour des motifs de non rentabilité, de complexité des procédures et de décarbonation, soit à les réexporter soit à les démolir, et ce, conformément à la loi du 14 février 2017 relative à la révision du régime des avantages fiscaux.
Objectifs officiels recherchés à travers ce projet : réduction de leur entreposage à travers leur enlèvement et libération d’importantes superficies, protection de l’environnement en ce sens où cette ferraille est généralement extrêmement polluée et sauvetage d’une entreprise publique en grande difficulté (déficits, pertes, remous sociaux, concurrence déloyale..) en mettant à sa disposition un véritable gisement de matières premières.
L’empreinte du Chef de l’Etat
Abstraction faite de ces éclairages, cet article du PLF 2025 porte, quelque part, la signature du Président de la république Kaïes Saïed. Et pour cause. Lors d’une visite inopinée, en 2023, à El Fouledh, suite à une hausse des prix du fer provoquée par la concurrence déloyale d’industriels véreux et de contrebandiers, le chef de l’Etat a pris la décision de maintenir El fouledh comme entreprise publique. “l’aciérie de Menzel Bourguiba ne sera pas cédée au secteur privé”, a-t-il affirmé.
Depuis, le président de la République a pris son bâton de pèlerin pour trouver les moyens qui permettront à El Fouledh de se redresser et de réguler le marché.
A la faveur de visites inopinées à l’entrepôt de la société des transports de Tunis (Transtu, Novembre 2023) à Bab Saadoun, et à la visite inopinée effectuée aux ateliers de la Société nationale des chemins de fer tunisiens ( SNCFT ) à Sidi Fathallah (mars 2024), le Chef de l’Etat a pris connaissance de l’ampleur des équipements, engins et véhicules usés abandonnés.
Il en a apparemment déduit que cette ferraille pourrait être utile à El Fouledh et constituer pour la société un gisement de matières premières au moindre coût. Un tel gisement va en plus lui permettre de disposer d’un important avantage comparatif à même d’impacter à la baisse les prix du fer et de réguler, ainsi, le marché.
Par delà ces supputations, nous pensons, que cet article du PLF 2025 constitue, à court terme, une bouffée d’oxygène pour la société et son personnel.
Plaidoyer pour l’accélération du plan de restructuration d’El Fouledh
Sur le moyen et le long terme, l’enjeu réside dans l’exécution du plan de restructuration de l’entreprise publique, objet d’un consensus entre la direction et les syndicats.
Selon la direction de la société, le coût de l’investissement à mobiliser pour la restructuration de la société, soit environ 295 MDT, équivaut au coût d’importation en devises de fer de construction. Cet investissement va aider l’entreprise publique à produire 300 000 tonnes de fer, soit le total des besoins du pays en ce matériau de construction.
A cette fin, nous espérons que le projet de demande, formulée par la Tunisie, le 10 janvier 2024, pour l’obtention auprès de la BERD d’un crédit de 70 millions de dollars, sera concrétisée dans les meilleurs délais. Ce financement étant destiné au renouvellement des moyens de production de la société Tunisienne de sidérurgie El Fouledh.