Triompher des contrariétés du changement climatique, est d’abord une affaire de volonté. Il se trouve que cela stimule le talent managérial et l’appétit d’innovation.
Samedi 7 décembre les Journées de l’Entreprise ont célébré la clôture avec un panel de choc. Le thème choisi examine les réponses ‘’pilotes’’ en parade aux retombées des phénomènes climatiques extrêmes. Le réchauffement climatique arrive en tête des soucis des opérateurs. Sans oublier la sécheresse qui semble exclure le mode opératoire actuel autant dans l’industrie que dans l’agriculture.
Ces deux activités exerçaient avec une certaine prodigalité qui avait cours quand l’eau était abondante. Trois individualités ont constitué un panel des plus animés. L’on a eu droit à un échantillon de cas de reconversion des modes de production, des plus réussis. Et des use cases modélisés avec des outils de calculs économiques les plus rigoureux.
Des problématiques maîtrisées
Retenez bien ces trois noms. Ce sont des titans de la prospective et des tacticiens de l’innovation. Sur terrain ils conçoivent, avec une vitesse V, la contre offensive managériale.
Abdelhamid Mnejja, DG du Génie rural et administrateur en charge de l’exploitation des eaux auprès de la SONEDE. A lui tout seul il préfigure la réactivité dont doit se parer la fonction publique. La problématique du réchauffement climatique et de son corollaire la sécheresse sont entièrement cernées.
Le pays sait exactement formaliser les contraintes et appréhender les retombées de ces deux phénomènes pénalisants. Les parades élaborées sont robustes et l’assistance, en proie aux alertes sur l’eau, a déstressé. Les calculs économiques les plus pointus ont été appliqués afin d’arrêter une stratégie de riposte, à l’échelle nationale. Cette dernière vise à apporter toute l’assistance nécessaire à l’ensemble des activités économiques.
“Triompher des contrariétés du changement climatique, est d’abord une affaire de volonté.”
Tout est passé au crible. Les calculs de coûts sont faits et les choix, à titre d’exemple pour les solutions d’irrigation alternative et jusqu’aux cultures verticales sont fin prêtes. On est dans la course avec ce qu’il faut de mordant. L’Etat n’est pas en retrait par rapport à son rôle moteur.
Le secteur privé a été superbement représenté, également. Mohamed Meksi, Directeur de la R&D chez Sartex, pour l’industrie textile. Et le secteur agricole a été brillamment représenté par Mohamed Sahbi Mahjoub, PDG de ‘’Sadira’’, entreprise agricole principalement exportatrice.
SARTEX : régler la maitrise de l’énergie et stopper la pollution avec plus value économique
L’industrie textile est à un tournant de redéploiement de son process de production. Surtout sur le marché international où le rouleau compresseur de la décarbonation commande la sélection des entreprises. Il s’agit d’un palier de transition existentielle. Prise en ciseaux par la problématique de la compétitivité et l’agenda environnemental, l’industrie textile ne peut performer qu’au prix d’une sortie par le haut.
Et tout le programme de Up Grading suivi par Sartex, superbement exposé par Mohamed Meksi restituait toute la pertinence des choix retenus. L’entreprise s’est engagée dans un plan de recyclage de ses eaux usagées. Elle récupère ses rejets et valorise ses résidus réalisant une économie avantageuse de coûts.
“Les entreprises tunisiennes sont à un tournant de redéploiement de leur process de production.”
En matière d’énergie électrique la démarche de Sartex est nourrie des mêmes soucis de prévenance environnementale et de calcul marchand. L’entreprise s’est dotée d’une centrale électrique pour la production d’énergie et d’un dispositif de co-génération pour la production de chaleur. Là encore l’autonomie est assurée et l’entreprise tourne en toute aisance. Gains de coûts garantis. L’exploit de Sartex est que l’entreprise casse un credo managérial, car elle développe une expertise supplémentaire en dehors de son cœur de métier ! Sans se disperser !
Sadira : L’agriculture prise sous le feu de la sécheresse et du rendement financier
Assoiffé par la sécheresse l’irrigation traditionnelle est mise en échec. L’eau manque, et il faut apprendre à basculer vers la culture sobre, soutient avec amertume mais sans résignation, Mohamed Sahbi Mahjoub.
Les exploitants sont appelés à une culbute technique. Rationner oui mais avec de la ruse. Un quantum d’eau quand il est séquencé sert mieux la croissance de la plante que s’il était administré en une seule fois. Cela a l’air simple mais c’est méritant de le trouver car c’est une recette gagnante. Cela améliore la récolte ainsi que les résultats de l’entreprise.
Pareilles recettes bénéfiques, notamment pour la détection de souches adaptées à la sécheresse Mohamed Sahbi Mahjoub en développe à profusion jusqu’à ne plus avoir soif. Mais là ne s’arrête pas l’effort d’innovation managériale. La carte agricole nationale peut être reconfigurée.
“L’agriculture est d’abord et avant tout garante de notre indépendance alimentaire.”
Au Maroc, pays proche et opérant avec des contraintes similaires aux nôtres, une superficie modeste de 12.000 ha destinée à la culture de la myrtille et de la framboise générerait un chiffre d’affaires de un milliard d’euros. Sous nos cieux cette même recette nous immobilise 1.600.000 ha d’oliviers.
Ne cédons pas à la facilité l’agriculture, précisera Mohamed Sahbi Mahjoub, est d’abord et avant tout garante de notre indépendance alimentaire. Cependant les fenêtres de performance ne doivent pas être fermées ni négligées, nous rappelle l’expérience de Sadira.
Les transformations sont en marche
Ah ! Quel finish ! Les transformations managériales sont en marche. Elles sont appliquées avec succès par le peloton de tête car aux prises avec le ‘’mur du son’’ de la compétitivité sur le marché international.
Les use cases des entreprises tunisiennes prouvent que le thème des journées illustre bien le répondant des managers tunisiens. Ils ont pu maitriser et domestiquer les solutions les plus avancées. Le pays se convertit à une nouvelle rationalité économique, avec superbe. A l’évidence ce sont les entreprises les plus prospères qui se mettent en pointe. Sauront- elle transmettre leur réactivité au reste du corps entrepreneurial national ? C’est le nouveau pari qui se pose à l’économie tunisienne.
Ali DRISS