«La hausse vertigineuse des billets et monnaies en circulation, enregistrée au cours cette dernière période, est un résultat évident de la nouvelle loi sur les Chèques », a affirmé l’ancien Directeur Général de la politique monétaire à la Banque Centrale de Tunisie (BCT), Mohamed Salah Souilem, dans une interview accordée à l’agence TAP.
Il a fait état d’un recours massif des tunisiens aux liquidités, ces dernières semaines, en substitution à l’utilisation des chèques, lesquels constituent “le moyen de paiement le plus utilisé en Tunisie, il ne faut pas l’oublier».
Il convient de noter que les billets et monnaies en circulation se sont situés au niveau de 22,8 milliards de dinars, à la date du 12 février courant, contre 21,2 milliards de dinars, à la même date de l’année dernière, ce qui représente une hausse de 7,5%, en glissement annuel, d’après les plus récents indicateurs monétaires et financiers publiés par la Banque Centrale de Tunisie (BCT).
«Cela étant, il faut dire que le rythme de progression de la masse des billets et monnaies est en général corrélé à l’inflation et à la croissance du PIB aux prix constants», a relevé Souilem.
Et de prévenir que «tant que nous n’avons pas trouvé d’alternatives au chèque, pour faciliter les paiements entre opérateurs économiques, en mobilisant de nouvelles solutions de paiement électronique, en développant la carte de crédit pour permettre à l’utilisateur de payer par facilités, en généralisant les virements et les paiements électroniques, ou en concevant des garanties pour l’usage des effets de commerce…, il faut s’attendre à de nouvelles hausses historiques pour les billets et monnaies en circulation. Ces hausses seront plus accentuées surtout avec l’avènement du mois de Ramadan et de l’Aïd, caractérisés par l’accroissement de la consommation du Tunisien et du recours massif à l’utilisation du cash».
Ainsi, il a affirmé que «cette loi va avoir des répercussions négatives sur le citoyen, mais surtout elle va entraver la croissance du pays, car elle va toucher le volume des transactions entre les opérateurs économiques», estimant que «plusieurs secteurs d’activité seront handicapés par les contraintes découlant des nouvelles dispositions de ladite loi».
Un autre problème, pourrait surgir, d’après lui, celui “du besoin de la BCT d’imprimer davantage de billets de banque pour faire face à ce rythme élevé de retrait de cash, ce qui peut entraîner des coûts supplémentaires d’impression pour l’institut d’émission et aussi, l’accélération de l’inflation”.
«Notre grande défaillance en Tunisie, consiste dans le fait que nous ne cherchons pas à identifier des solutions radicales pour nos problèmes, mais juste des solutions faciles», a-t-il dit.
«Personnellement, je pense que c’est inadmissible de changer toute une législation, à savoir celle des chèques, rien que pour quelque 500 personnes emprisonnées pour avoir émis des chèques sans provision », a t-il, encore, avancé, soulignant que le taux de rejet de chèques en Tunisie (chèques impayés) ne dépasse pas 1,5%.
«On aurait du maintenir l’ancienne loi sur les chèques et chercher d’autres solutions pour ce problème. C’est inefficace de tout changer sans préparer les solutions alternatives», a affirmé Souilem, proposant, entre autres, à “l’Etat de payer ses dettes envers plusieurs opérateurs économiques, afin que ces derniers puissent, à leur tour, honorer les chèques déjà émis au profit d’autres opérateurs économiques”.
Pour rappel, la nouvelle loi sur les chèques sans provisions (loi n° 41 de l’année 2024) a été publiée, en août 2024, au Journal Officiel de la République Tunisienne.