Plusieurs radios et chaines de télévision privées ont tendance, ces derniers temps, à couvrir les cas de corruption signalés dans les entreprises et établissements publics et à inviter, à cette fin, des dénonciateurs licenciés pour avoir donné l’alerte. Ces lanceurs d’alerte, qui expliquent leur initiative par leur seul souci de défendre les intérêts de la Tunisie, donnent l’impression qu’ils sont profondément désespérés de ne trouver aucun écho auprès de la hiérarchie pour mettre fin à ce fléau.

Ils ont mis à profit leur apparition dans les médias et réseaux sociaux pour demander une audience avec le Président de la république pour l’informer, dossiers à l’appui, des abus commis en toute impunité.

Les infractions révélées sont énormes et multiformes. Elles sont, souvent, très graves. Elles se traduisent par un manque à gagner de plusieurs milliards de dinars pour l’Etat. Pis, les syndicalistes, qui devaient être les premiers à alerter sur les dérapages se trouvent, du moins d’après les dénonciateurs, au premier rang des corrompus.

Concrètement, les cas de corruption identifiés portent, notamment, sur les abus commis lors des passations de marchés publics, les recrutements systématiques par connivence, la mauvaise gestion généralisée, l’octroi de juteuses largesses aux partenaires étrangers et à des lobbys importateurs influents au détriment des intérêts du pays et du citoyen consommateur…

Abstraction faite de l’ampleur de la corruption qui gangrène notre secteur public, phénomène qui s’est banalisé, démocratisé et exacerbé avec l’arrivée au pouvoir des islamistes, empressons nous de relever que les actuels ministres, nommés à peine, il y a quelques mois,  n’assument, en principe, aucune responsabilité dans l’exacerbation du phénomène. Le mal est structurel. Il remonte aux régimes autoritaires,  au temps de Bourguiba, Ben Ali et Ennahdha. le mal est plus profond. Il est structurel.

De notre point de vue, la solution ne résiderait pas dans l’écartement des cadres corrompus  et même des personnes qui ont bénéficié de leur complicité mais dans l’institution de nouvelles lois qui réglementent, en toute transparence,  la dénonciation des cas de corruption dans le secteur public.

Légaliser en urgence la dénonciation de la corruption

Le mécanisme le plus indiqué, à ce sujet serait le « Whistleblowing ». Il s’agit d’ un système d’alerte professionnel qui permet à tous les membres du personnel de signaler les infractions constatées. Il constitue un outil important de prévention et de détection des cas de corruption et des actes malveillants au sein des organisations. En instaurant un tel dispositif, l’entreprise pourrait identifier les risques potentiels et adopter les mesures correctives nécessaires.

Un tel dispositif encadré par une loi, permettrait à toute personne travaillant dans l’entreprise ou l’établissement public de dénoncer, en toute confiance, sérénité  et sécurité,  les abus répréhensibles.

Détenteurs d’informations privilégiées, les salariés sont les mieux placés pour détecter les cas de fraude et dénoncer les irrégularités dans une entreprise. C’est pourquoi, le rôle des syndicats en tant que contrepouvoirs, peuvent jouer dans la sensibilisation de leurs adhérents à ce dispositif de lutte et de prévention contre corruption est primordial.

A bon entendeur.

Abou SARRA